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J'ai vu Paris se réveiller
Aux croissants chauds, aux café-crème
Paris penché sur ses problèmes
Paris moutard, Paris certife
J'ai vu Paris de déniaiser
Paris bistrots, Paris les potes
Paris les filles qu'on bécote
Et pelote sur les fortifs
Paris gamberge
Paris vingt berges
Paris je t'emmène en goguette
Sur son cadre de bicyclette
J'ai ta peau à déboutonner
Paris les bouges
Paris vin rouge
Paris oisif, Paris débauche
Mais aussi Paris pas d'embauche
Au seuil des usines gardées
J'ai vu Paris, le poing brandi
Et l'âme révolutionnaire
Découvrant son front populaire
Paris descendre dans Paris
J'ai vu Paris se passionner
Pour un roi lui rendant visite
Un condamné qu'on décapite
Une invention, un mot d'esprit
J'ai vu Paris s'époumoner
A chanter un air à la mode
Froufrou, mon cul sur la commode
Mais par malheur j'ai vu aussi
Paris la guerre
Paris misère
Paris décomposer qu'on viole
Paris qui n'a plus la parole
Vaincu, souffrant et humilié
Paris la gronde
Paris la fronde
Paris courage, Paris terne
Paris gazogène et en berne
Paris-Londres parachuté
J'ai vu Paris jouer sa vie
Paris ras-le-bol des brimades
Et juché sur ses barricades
Paris redevenir Paris
J'ai vu Paris se transformer
S'emballer pour l'automobile
Paris se croire aux mille mille
Paris chauffard, Paris râler
J'ai vu Paris se libérer
Paris blues-jeans, adieu complexe
Paris égalité des sexes
Paris pilule, émancipé
Paris qui grogne
Paris qui cogne
Paris aux urnes prophétiques
Paris qui parle politique
Et s'enflamme pour une idée
Paris en grève
Paris qui rêve
Paris assis cassant la croûte
Ou pissant au bord des routes
Arrosant ses congés payés
Paris d'hier et de toujours
Paris vingt siècles de jeunesse
Pour tous tes amants tes maîtresses
Tu restes le plus grand amour
D’origine portoricaine et haïtienne, né en 1960 à Brooklyn dans l’Etat de New York et mort à New York en 1988 à la suite d’une overdose à l’âge de vingt-sept ans, Basquiat appartient à la génération des graffiteurs qui a brusquement émergé à New York à la fin des années 70. En 1977, il commence à signer ses graffitis du nom de SAMO (pour « Same Old Shit ») accompagné d’une couronne et du sigle du copyright. Au cours de sa fulgurante carrière, sa peinture passe de la rue au tableau.
Son univers mélange les mythologies sacrées du vaudou et de la Bible en même temps que la bande dessinée, la publicité et les médias, les héros afro-américains de la musique et de la boxe, et l’affirmation de sa négritude. Il définit ainsi une contre-culture urbaine, underground, violente et anarchique, pétrie de liberté et de vitalité. En 1982, Basquiat est invité à participer à la Documenta 7 de Kassel en Allemagne. L’année suivante, il est le plus jeune et premier artiste noir à exposer à la Biennale du Whitney Museum of American Art à New York.
À partir de 1984, il réalise en commun des peintures avec Andy Warhol jusqu’à la mort de ce dernier en 1987.S’étant toujours défini comme un peintre influencé par son environnement urbain quotidien, les racines de sa pratique «expressionniste primitiviste» sont à trouver du côté d’une peinture européenne d’après-guerre, celle de Jean Dubuffet, réfractaire à l’«asphyxiante culture» ou celle de Cobra, ainsi que du côté de la grande tradition américaine de Robert Rauschenberg à Cy Twombly. Après sa mort prématurée en 1988, il laisse une œuvre considérable habitée par la mort, le racisme et sa propre destinée. Sa vie brûlante et explosive, mêlant le star-système et la révolte, a inspiré en 1996 le film « Basquiat » du peintre et cinéaste Julian Schnabel. En 1984, le musée d’Art moderne de la Ville de Paris avait déjà présenté Jean-Michel Basquiat dans une exposition collective consacrée au mouvement de la Figuration Libre France/USA, aux côtés de Robert Combas, Hervé Di Rosa, Keith Haring.
Cette rétrospective composée d’une centaine d’œuvres majeures (peintures, dessins, objets) provenant de nombreux musées et de collections particulières américains et européens, permet de reconstituer le parcours chronologique de l’artiste et de mesurer son importance dans l’art et dans l’histoire de l’art au-delà des années 80.
L’exposition Basquiat a été conçue par la Fondation Beyeler à Bâle - où elle a d'abord été présentée (9 mai - 5 septembre 2010) -, et organisée en collaboration avec le Musée d’Art moderne de la Ville de Paris. C'est la première exposition de cette ampleur jamais consacrée à Basquiat.
Commissaire général de l'exposition : Fabrice Hergott
Commissaires : Marie-Sophie Carron de la Carrière, Dieter Bucchart